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La discipline positive, est-ce un monde de licornes?

Par Marie-Eve Lachance, intervenante et responsable des communications

Petit extrait de mon lundi de Pâques ...

7h30 :

Les enfants se lèvent et nous aussi. Pour une fois qu’on se lève en même temps qu’eux on se dit que ça fera plus de temps pour tout faire, moins de stress et qu’on aura assurément du plaisir… Évidemment faut bien rêver dans la vie ahah!

8h00 :

Bon le déjeuner c’est quand même bien passé, mieux que d’habitude. Il fait beau, les enfants sont de bonne humeur jusque-là, on reste sur notre nuage. Oui, c’est décidé, ce sera une belle journée! 😊

8h10:

Ça se corse… Il a suffi de la consigne : « allez brosser vos dents » pour déclencher immédiatement 3 conflits, 2 crises et même un geste de violence! « C’est moi qui étais là en premier! » « Même pas vrai! » « Ouch Jade tu me fais mal! » «Maaaammmmaaaaaaaaaan!!!!!! Jade m’a mordu! » Ouf. Bon ok on respire, je vais les voir et demande des explications. On fait un peu d’éducation sur l’affirmation de soi puis vient des excuses sincères, un petit câlin et la recherche de solutions pour l’ordre de qui va pouvoir utiliser le « foutu banc qui est toujours dans les jambes quand personne ne l’utilise » (parce que oui, c’est super important de pouvoir se regarder dans le miroir quand on se brosse les dents, tout le monde sait ça!) Bon, on peut passer à mon étape préférée (not), l’habillage!

8h20:

Bon là ça dégénère, on n’est même pas encore sortis dehors, que j’ai déjà pu de patience. J’ai géré 3-4 chicanes, j’ai couru dans la maison après ma 2 ans parce que c’est donc drôle de se sauver quand quelqu’un essaie de nous aider à nous habiller. Quand je l’attrape j’ai le droit à un « Non c’est moi qui le fais tute  seulleeeee! » « Ok Jade fais-le ma belle d’abord! » Puis elle lance ses choses le plus loin possible et on repart! Grrrrr…Pendant ce temps-là, mon 7 ans est rendu avec un bout de bois de 5 pieds de long qu’il tournoie tel un expert du bâton enflammé dans un show du cirque du soleil, mais sans la dextérité qui vient avec et surtout à 1 pouce du char. Je l’avertis, je réussis à résonner ma 2 ans puis on finit par sortir. Yeah!

8h30

Ma 5 ans me dit qu’elle veut rentrer. « Non là, sérieux? On vient juste de sortir Marianne! On va jouer dehors un peu ensemble d’accord? Il fait beau là, ça va être le fun! » (Que je dis, pas convaincue du tout parce que je suis déjà brûlée) « Ok maman mais on va au parc »… Donc on va au parc! Et pour eux le parc, c’est de se faire pousser dans la balançoire chacun leur tour jusqu’à ce que maman n’ait plus de fun pantoute… Donc un moment donné, je mets la limite et ils acceptent d’aller jouer dans le module. On joue au requin et c’est super drôle, jusqu’à ce que j’en attrape un et là ce n’est plus drôle! « C’est vraiment pas juste, t’es plus rapide que nous! » (Mais ça fait 20 minutes que je suis le requin donc on s’entend que je leur ai laissé pas mal de chances...) « Bon ben je pense que c’est peut-être le temps qu’on change d’activité alors, si vous n’avez pas de plaisir? Je dois aller promener le chien donc on va aller prendre une belle marche en famille! » « Nooooooonnnnnn! (Disent-ils en cœur) » Pas la réaction que j’espérais mais c’est un peu me mettre la tête dans le sable que d’en espérer une différente. Mais comme je tiens à leur santé, que je tiens à leur apprendre que parfois on fait des choses moins le fun mais que ça nous fait du bien et même qu’on peut avoir du plaisir en bout de ligne, et peut-être aussi parce que j’ai un petit côté masochiste ben je ne leur donne pas le choix!

9h15

Ça fait 5 minutes qu’on marche et je me suis déjà arrêtée 7 fois. Une fois pour la crotte du chien, une fois parce que ma 2 ans voulait débarquer de la poussette pour marcher, une fois parce qu’elle voulait rembarquer dedans, une autre fois parce qu’elle voulait redébarquer et un autre fois rembarquer, une fois parce que mon 7 ans voulait trainer le chien, une fois parce que ma 5 ans a fait une crise parce que ce n’est pas juste que son frère traine le chien et pas elle… Bref, rendue en plein milieu de la marche j’ai mal à la tête et je regrette clairement mon choix. Donc après avoir tenté de garder ma bonne humeur et de faire de l’ignorance sélective du chialage, je prends une bonne grande respiration je m’arrête une ultime fois. 1. J’attache ma 2 ans dans sa poussette. Bien sûr elle n’est vraiment pas contente donc je lui fais un câlin en lui disant que je la comprends d’être fâchée mais que c’est pour sa sécurité et je lui offre de mettre de la musique qu’elle aime pour le reste de la marche. 2. On trouve une solution pour le partage du chien, les enfants décident de faire chacun 5 minutes. Parfait, marché conclu. 3. Je leur demande de trouver un moyen de rendre le reste de la marche plus agréable et je leur dis qu’ils pourront avoir chacun 3 jetons si la marche se termine dans le respect et le plaisir d’être ensemble. (Vive le magasin général des belles combines !)

11h30

Le reste de la matinée s’est relativement bien passé, le reste de la marche a été plus zen et je me suis sentie pas mal fière de moi. Il y a eu quelques obstinations de routine pour ramasser leurs vêtements d’extérieur et aller jouer ensemble, plus quelques conflits ici et là, mais rien de bien dramatique depuis au moins 1h30. Mais là, l’heure de manger approche et la maison est en bordel même si mon conjoint et moi venons de passer la dernière heure et demie à ramasser un peu partout, laver la vaisselle, plier le linge etc. Comme on sait que ça peut prendre un certain temps à se mettre en action, on demande aux enfants de ramasser avant le dîner…

Et là, c’est la dé-ban-da-de! Mon 7 ans a subitement un regain d’énergie (pour ne pas dire d’hyperactivité) et court partout en criant des choses incompréhensibles, ma 5 ans crie parce que son frère fait juste des niaiseries au lieu de l’aider, ma 2 ans hurle parce qu’elle est fatiguée et qu’elle a faim mais surtout parce que je lui ai dit non quand elle a voulu embarquer sur le comptoir après avoir poussé sa chaise à côté. (mais elle avait déjà apporté le petit banc dans la cuisine en plus?!) En ce moment on se croirait dans un zoo… Mon conjoint et moi on se regarde et on a juste le goût de se sauver. En me retournant je m’enfarge dans le « foutu banc qui est toujours dans les jambes quand personne ne l’utilise » et je me retiens de laisser échapper un mauvais mot. Je respire, je prends ma 2 ans dans mes bras et je lui demande si elle a faim, ce qu’elle acquiesce. Je lui donne un morceau de fromage et mon conjoint s’en va gérer les 2 autres.

12h

Bon ça a pris 3 avertissements, un retour au calme et une résolution de conflit assis dans le salon mais on a fini par y arriver! Tout le monde mange (ou presque), on se raconte des choses joyeusement, parfois on parle en même temps et on est fâchés de se faire couper la parole mais on se pratique à lever la main. Ma 2 ans n’a clairement pas faim finalement parce qu’elle s’amuse à faire un totem avec son sandwich au thon, on lui enlève puis elle crie qu’elle a faim, on lui redonne elle rejoue… On finit par se tanner et lui dire que c’est terminé et là, elle lance son verre de lait plein, sur la table. Ouf là j’en peux plus. Le seul mot qui me vient c’est « TABARN** ». Mon 7 ans qui me dit : « maman tu as dit un mot sacré! » « Oui, tu as raison mon coco je m’excuse ». Puis ma 2 ans hurle parce qu’on s’est fâché. Bon, je vais aller me calmer dans ma chambre je pense (le temps de pause est bon pour les parents aussi!) Après 1 minute, je reviens plus zen, je prends ma 2 ans et l’amène lire dans sa chambre avec un gobelet de lait en priant ben fort pour qu’on puisse la coucher sans trop de défis. (Ce n’est pas facile les dodos ces temps-ci…) Bon encore une fois je me dis que c’est beau de rêver mais cette fois-ci j’ai prévu le coup et on a installé une belle feuille de collants qu’elle pourra choisir si elle se couche sans faire de crise.


...Bref.


Je pourrais vous en raconter encore longtemps des anecdotes comme ça et il y a même des journées pires en fait et je sais que nous ne sommes pas les seuls à vivre tout ça…


Mais ce que je voulais vous dire c’est que non la discipline positive ce n'est pas un monde de licornes, loin de là! La discipline positive ne changera pas la personnalité de mes enfants et ça ne les rendra pas non plus sages comme des images et nécessairement plus faciles à gérer. Ça ne fera pas non plus en sorte qu'ils n'auront plus d'émotions « négatives. » Cependant, ça me donne des outils pour savoir quoi faire avec tout ça et leur apprendre quoi faire avec tout ça! Ça me permet de me sentir un peu plus en contrôle dans mon rôle de parent et ça me permet d’être plus proactive dans la recherche de solutions face aux situations qui me dépasseraient normalement. Et par-dessus tout, ça me donne la confiance que j’ai ce qu'il faut au fond de moi et qu'il me suffit de faire de mon mieux.


Et quand je regarde mes 3 enfants jouer ensemble en se respectant et en partageant, quand mon plus vieux raconte des histoires à ses 2 sœurs et qu’elles rient aux éclats, quand ma 2 ans prête sa doudou à sa sœur qui a de la peine et quand ma 5 ans me dit qu’elle est fière d’elle, je me dis que oui, ça peut être beau de rêver!



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